Pour la première fois en 200 ans, les Peugeot perdent leur majorité dans PSA.

Par Les Echos | 18/02 | 06:53 | mis à jour à 17:09

L’entrée de l’État français et du chinois Dongfeng au capital de PSA Peugeot Citroën, la création d’une coentreprise entre sa filiale bancaire et la banque Santander, ainsi que la prise en main du constructeur par Carlos Tavares ont été approuvées ce mardi par le conseil de surveillance du groupe.

L’entrée de l’État français et du chinois Dongfeng au capital de PSA Peugeot Citroën a été approuvée par le conseil de surveillance du groupe français ce mardi – AFP

C’est une page qui se tourne pour la famille Peugeot. Mais aussi un nouveau chapitre qui s’ouvre dans l’histoire de PSA. Le conseil de surveillance du constructeur automobile a validé mardi un accord qui ouvrira le capital du groupe au chinois Dongfeng. Ce protocole non contraignant, qui sera officiellement détaillé par le groupe mercredi, porte sur une augmentation de capital de trois milliards d’euros à laquelle prendront part, moyennant 800 millions d’euros chacun, le Dongfeng, mais aussi l’Etat français. Une décision qualifiée plus tôt dans la matinée « de patriotisme économique et industriel », par le ministre du Redressement productif, et qui, en échange, verra l’Etat comme le Chinois s’octroyer 14% du capital du premier constructeur automobile français.

« PSA a des technologies, des marques mais est enfermé dans le marché européen, à l’inverse Dongfeng n’a pas de technologie, pas de marque, mais a la croissance du marché asiatique », a justifié Arnaud Montebourg interrogé ce mardi matin sur France Inter. Donc c’est un échange de bons procédés et l’Etat français est au milieu pour garantir l’équilibre d’une alliance à la fois capitalistique et industrielle » ». Et d’ajouter : « nous construisons un géant qui se porte à la conquête de marchés mondiaux. »

La part de la famille Peugeot, qui après des tensions internes a fini par approuver cette solution, tombera elle aussi de 25,4% à 14%. Au passage, celle-ci perdra aussi ses droits de vote double (qui lui assurent actuellement 38,1% des droits de vote) ainsi que des sièges au conseil de surveillance. De quatre aujourd’hui, ceux-ci pourraient être ramenés à deux. Pour s’être rangé dans le camp des opposants à un tel accord,Thierry Peugeot, pourrait, quant à lui, devoir abandonner la présidence du conseil.

L’opération pourrait être portée à près de quatre milliards d’euros par le biais de bons de souscription d’actions (BSA). Ces bons donnent droit de souscrire, pendant une durée déterminée, à des titres dont le prix est fixé à l’avance. Mais l’accord final, qui devrait être signé fin mars lors de la visite du président chinois Xi Jinping à Paris puis validé par une assemblée générale extraordinaire attendue dans la foulée, devrait aussi comporter une clause prévoyant que les Peugeot, l’État et Dongfeng ne puissent pas porter leur niveau de participation au-delà de 14 % pendant dix ans.

Limiter l’influence de Dongfeng

Cela afin de limiter l’influence de Dongfeng au sein du premier constructeur automobile français. Et de préserver l’emploi au sein du groupe français qui compte encore 90.000 salariés dans l’Hexagone. Un must pour le ministre du Redressement productif. Mais aussi pour l’ancien ministre (UMP) de l’industrie.

« Pour moi, ça [l’accord] n’est pas une mauvaise chose. Ce qui est essentiel, c’est de s’assurer que la famille Peugeot et l’Etat qui rentre au capital constituent une majorité pour que les Français assurément restent majoritaires dans ce partenariat avec Dongfeng », a convenu ce mardi Christian Estrosi, interrogé sur France Info. Non sans reprocher au passage au ministre du Redressement productif son attitude passée vis-à-vis de la famille Peugeot et à Philippe Varin, son PDG. Arnaud Montebourg a eu « des mots trop violents quelque fois à l’égard de nos propres industriels (…) et, en traitant de manière inacceptable la famille Peugeot il y a maintenant un peu plus d’un an, d’avoir fait perdre en bourse près de 18% à PSA », a-t-il indiqué.

S’agissant de l’impact possible de cet accord sur l’emploi « nous avons pris une décision de patriotisme économique et industriel, avec des engagements qui ont été pris par la direction, opposables aux nouveaux actionnaires », avait insisté auparavant le ministre du Redressement productif faisant allusion à l’accord social signé par l’entreprise.

Parmi ces engagements figurent l’objectif d’un million de véhicules produits en France en 2016 contre 930.000 actuellement, l’affectation d’un nouveau véhicule sur chacun des sites français, et des investissement d’un montant total d’un milliard et demi d’euros dans l’Hexagone, a rappelé Arnaud Montebourd qui exclut toute possibilité d’une fermeture d’usine PSA en France dans un futur proche, notamment à Poissy, où une des deux équipes dédiées à l’assemblage de la Peugeot 2008 sera supprimée le mois prochain , et à Sochaux.

« La restructuration a eu lieu, elle a été suffisamment douloureuse, maintenant nous sommes en train de nous redéployer pour augmenter nos capacités de production », a-t-il martelé évoquant la suppression de déjà plus de 11.200 postes en France et la fermeture d’Aulnay.

Cela alors que PSA, déjà copropriétaire de trois usines communes avec Dongfeng en Chine, réfléchirait à se doter d’un quatrième site pour accélérer son déploiement dans le sud-est asiatique. Et alors que, selon le Figaro, le Français, déjà implanté en Slovaquie, envisagerait également de se doter d’une usine à la lisière de l’Europe de l’Ouest pour y construire des petites citadines. Une information confirmée lundi par Philippe Varin devant des syndicalistes.

Relancer le constructeur

Relancer le constructeur, qui a essuyé une perte nette historique de cinq milliards d’euros en 2012, c’est aussi l’objectif de deux autres points également approuvés ce mardi par le conseil de surveillance :

L’entrée en fonction plus tôt que prévu de Carlos Tavares et la création d’une coentreprise entre la filiale bancaire de PSA et la banque espagnole Santander

L’ex-numéro deux de Renault a fait son entrée début janvier au directoire pour pouvoir boucler le budget 2014 devrait ainsi être nommé à la tête de la branche automobile dès mercredi , jour choisi par le constructeur pour publier ses résultats au titre de l’exercice 2013. Il prendra ainsi officiellement en main la gestion de l’opérationnel, tandis que Philippe Varin se concentrera sur le bouclage des négociations avec l’État et Dongfeng.

Quant au rapprochement avec Santader il devrait permettre à Banque PSA Finance de récolter un milliard d’euros et d’assurer sa solidité lorsque prendra fin, en décembre 2016, la garantie publique de sept milliards d’euros dont elle bénéficie.

Les Echos, avec agences

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