Comment recruter et fidéliser la génération Z ?

Les centennials arrivent sur le marché de l’emploi. Malgré la crise, ils se montrent exigeants à l’égard des employeurs.

La génération Z, également connue sous le terme de centennials, est composée de jeunes nés à partir des années 90. Digitalisés, connectés, ils frappent à la porte des entreprises. Dans les années à venir, ils vont faire évoluer profondément le rapport au travail ou à la hiérarchie. Reste à savoir comment les employeurs peuvent réussir à les attirer et à les fidéliser. La question est importante. La France compte  15 millions de personnes nées après 1994.

Les Z, une génération sacrifiée ?

« Globalement, les principales caractéristiques de la génération Z commencent à être connues du grand public et des employeurs. Quel que soit leur secteur d’activité, les Z seraient connectés, créatifs et rétifs au management pyramidal. C’est vrai. Cependant, il est nécessaire que les recruteurs poussent l’analyse un peu plus loin en prenant en compte le contexte dans lequel cette nouvelle génération arrive sur le marché du travail », explique Didier Pitelet, directeur d’Onthemoon, une agence de communication spécialisée dans le conseil en culture d’entreprise.

« La mobilité est désormais choisie et non plus subie »

« La génération précédente, c’est à dire la génération Y, a débarqué dans les openspace dans un contexte difficile marqué par l’explosion du chômage des cadres, la crise de 2008, la généralisation des CDD, la rareté duCDI vu comme un précieux sésame… Or, les Y, surtout ceux qui sortaient de bonnes écoles avaient été assez formatés. Ils pensaient que les choses seraient simples une fois le diplôme en poche. Pourtant, ça n’a pas été le cas. Les impacts ont été grands sur leur rapport au travail. J’observe dans mes activités de conseil que les Y sont une génération plutôt cynique qui n’adhère pas forcément aux valeurs de l’entreprise », analyse Didier Pitelet, pour qui les choses sont toutes autres avec la génération Z.

« Paradoxalement, la crise serait pour eux une raison de se montrer plus exigeant à l’égard des employeurs »

« Les Z c’est totalement différent. Ils savent qu’ils risquent de connaître la crise et la précarité. Cette génération a acquis le fait qu’elle devra changer plusieurs fois de carrière dans sa vie. Pour eux, c’est un fait. La mobilité est désormais choisie et non plus subie. Ils n’attendent pas des miracles et des promesses de la part des entreprises et des recruteurs. Ce n’est pas parce que le travail est plus rare qu’ils accepteront n’importe quoi. En revanche, ils comptent beaucoup sur eux même. Ils développent des solutions parallèles par exemple avec un statut d’auto-entrepreneur. Ils accordent une grande importance à leur personal branding », poursuit-il. Paradoxalement la crise du marché du travail serait pour eux une raison de se montrer plus exigeants à l’égard des employeurs.

Face à la crise, carpe diem

Nouveaux entrants sur le marché du travail, la génération Z a compris qu’il ne servait à rien de se plaindre et qu’il valait mieux savourer le moment présent sans toujours penser au lendemain. C’est la raison pour laquelle Didier Pitelet aime qualifier cette jeune génération de « jouisseurs du temps présent ».

« Les Z veulent profiter du temps présent pour s’investir à fond dans les missions qui leur sont confiées »

Antony Besson, directeur et fondateur deDigicomstory, une agence de social media qui collabore avec plusieurs jeunes de la génération Z en CDI, en contrat d’apprentissage ou en stage en entreprise est du même avis : « La génération Z est dans un état d’esprit carpe diem. Elle cultive l’immédiateté. Je remarque moins de carriérisme et de calcul à moyen terme. Les Z veulent profiter du moment présent pour s’investir à fond dans les missions qui leur sont confiées, ce qui m’oblige en tant que dirigeant à revoir ma vision du travail ».

« Pour tenir compte de l’état d’esprit de cette génération, les attirer puis les fidéliser, je m’adapte en donnant des projets stimulants qui encouragent l’investissement individuel, qui incitent à se donner à fond au jour le jour et à éviter la routine », étaye le dirigeant.

« Leur progression se fera en travaillant en mode projet plus qu’en se soumettant à des plans de formation de long terme »

Une vision des choses partagée par Didier Pitelet : « C’est la bonne façon d’agir. Aujourd’hui, la génération Z pense que sa progression se fera en travaillant en mode projet plus qu’en se soumettant à des plans de formation  de long terme extrêmement rigides ». Concrètement, cela signifie que lors d’un entretien d’embauche avec un membre de la génération Z, il n’est pas forcément nécessaire de parler de perspectives à long terme. En revanche, il semble incontournable de décrire précisément les missions que le futur collaborateur devra réaliser dès son arrivée dans l’entreprise. « C’est un prérequis. En prenant le temps de dialoguer avec la génération Z, on se rend de toute façon compte que rares sont ceux qui savent ce qu’ils seront et ce qu’ils feront dans cinq ans », constate Didier Pitelet.

Métro, boulot, dodo ? Au cachot

La vie professionnelle étant de plus en plus longue et diversifiée, la génération Z s’oppose massivement à toute forme de routine. Rejetant le fonctionnement « métro-boulot-dodo », elle considère le travail comme un lieu d’épanouissement voire de divertissement.

« Je suis conscient de cette situation. Cela va s’accentuer dans les années à venir. C’est pourquoi j’ai par exemple choisi de ne plus fonctionner en open space classique », déclare Antony Besson. « Je veux que l’on se sente vraiment chez soi lorsque l’on est au bureau. La cuisine est au milieu de l’espace de travail, il est possible de travailler dans des canapés… Ce n’est pas du cosmétique mais un moyen de tirer le meilleur de tous, de stimuler le dialogue et la créativité », explique le chef d’entreprise.

Les locaux de Digicomstory sont conçus pour plaire à la génération Z.

Mais attention, les jeunes de la génération Z ne sont pas là pour s’amuser. Les experts interrogés reconnaissent leur force de travail et leur investissement. Ils sont par exemple nombreux à ne pas considérer comme tabou le mélange entre vie professionnelle et vie personnelle. « C’est assez frappant de voir que cette génération ne saucissonne plus sa vie. Le mélange vie pro vie perso est réel. Le travail va au domicile et le loisir est au travail grâce aux réseaux sociaux. Il s’agit d’une rupture de taille avec les générations précédentes », analyse Didier Pitelet.

« Ils aiment souvent travailler de chez eux sur des sujets personnels et apprécient utiliser des ressources mises à disposition par leur employeur. D’ailleurs, pour les employeurs, c’est une bonne idée d’encourager les jeunes sur des projets parallèles. Les Z sont ce que j’appelle une génération de slasheurs, c’est à dire qu’ils mènent plusieurs activités à la fois ».

Enfin, assure Didier Pitelet, « Si les Z demandent de l’autonomie et des marges de manoeuvre, c’est parce qu’ils n’ont pas l’intention de compter leurs heures si un projet les intéresse. C’est une bénédiction pour les recruteurs s’ils arrivent à bien s’y prendre ». A bon entendeur.

 

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